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de Robinson Crusoé.

de bélier, & une gueule comme celle d’un lion, avec des dents crochues, les plus affreuses qu’on puisse s’imaginer. Elle étoit habillée d’une manière proportionnée à son abominable figure. Son corps étoit couvert de peaux de mouton, avec la laine en dehors, & elle avoit sur la tête un bonnet à la Tartare, armé de deux grandes cornes ; sa hauteur étoit environ de huit pieds ; enfin ce n’étoit qu’un buste sans bras & sans jambes.

Cette statue monstrueuse étoit érigée hors du village, & quand j’en approchai, je vis devant elle seize ou dix-sept créatures humaines : je ne pouvois dire si c’étoient des hommes ou des femmes ; car ils ne distinguent point du tout les sexes par l’habillement. Ils étoient tous étendus le visage contre terre, pour rendre leurs hommages à cette hideuse divinité, & ils étoient tellement immobiles, que je les crus d’abord de la même matière, que l’idole. Pour m’en éclaircir, je voulus en approcher davantage ; mais je les vis tout d’un coup de lever avec la plus grande précipitation du monde, en poussant les hurlemens les plus épouvantables, semblables à ceux d’un dogue ; & ils s’en allèrent tous, comme s’ils étoient au désespoir d’avoir été troublés dans leur dévotion.

À une petite distance de l’idole, je vis une espèce de hutte toute faite de peaux de vaches