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Les aventures

Au sortit d’une petite ville nommée Changu, nous fûmes obligés de très-grand matin de passer une petite rivière, & si les Tartares avoient eu le sens commun, ils auroient eu bon marché de nous, en nous attaquant dans le même tems que la caravane étoit passée, & que l’arrière-garde étoit encore de l’autre côté ; mais nous ne les vîmes pas seulement paroître.

Environ trois heures après, étant entrés dans un désert de quinze ou seize milles d’étendue, nous apperçûmes par un grand nuage de poussière que l’ennemi n’étoit pas loin, & un moment après nous les vîmes venir à nous au grand galop. Là-dessus les Chinois qui faisoient notre avant-garde, & qui, le jour auparavant, avoient fait extrêmement les braves, firent voir une fort mauvaise contenance, en regardant à tout moment derrière eux : ce qui est un signe certain que le soldat branle dans le manche. Mon vieux pilote en avoit fort mauvaise opinion aussi-bien que moi. Seigneur Anglois, il faut encourager ces drôles-là, me dit-il, ou nous sommes perdus ; ils s’enfuiront dès que nous aurons les Tartares sur les bras.

» Je le crois, comme vous, lui répondis-je, mais que faire pour empêcher ce malheur » ? Mon avis seroit, répliqua-t-il, qu’on plaçât cinquante de nos gens sur chaque aîle de ce corps