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Les aventures

où l’on peut acheter un si grand nombre de choses qu’on peut vendre ailleurs, en y faisant un profit très-considérable.

Quoi qu’il en soit, je gagnai beaucoup dans ce premier voyage ; j’y acquis des lumières pour faire de plus gros gains ; & si j’avois eu quelque vingtaine d’années de moins, j’y serois resté avec plaisir, bien sûr d’y faire ma fortune : mais j’étois plus que sexagenaire ; j’avois des richesses suffisamment, & j’étois sorti de ma patrie moins pour acquérir des trésors, que pour satisfaire à un desir inquiet de roder par tout le monde. C’est avec bien de la justice que j’appelle ce desir inquiet ; car quand j’étois chez moi, je n’avois point de repos que je ne fusse dans quelque course ; & quand je courois j’étois impatient de revoir mon pays. Ainsi le gain me touchoit fort peu, puisque j’étois riche, & que naturellement je n’étois pas avare ; je crus donc n’avoir guères profité par ma course, & rien ne pouvoit me déterminer à en entreprendre d’autres, que le desir de voir de nouveaux pays ; mon œil étoit semblable à celui dont parle Salomon, qui n’étoit jamais rassasié de voir ; & mes voyages, bien loin de me contenter, ne faisoient qu’animer ma curiosité pour d’autres voyages. J’étois venu dans une partie du monde, dont j’avois entendu parler beaucoup, & j’étois résolu d’y voir tout ce