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Les aventures

leurs flèches une seconde fois ; mais qu’on tînt le canon tout prêt.

En même-tems j’ordonnai à Vendredi de se mettre sur le tillac, pour les arraisonner, & pour demander quel étoit leur dessein. Je ne sais pas s’ils l’entendirent ; mais je sais bien que cinq ou six de ceux qui étoient dans les canots les plus avancés, nous montrèrent leur derrière tout nud, comme s’ils nous vouloient prier gracieusement de le leur baiser. Si c’étoit seulement une marque de mépris, ou si par-là ils nous défioient, & donnoient le signal aux autres, c’est ce que j’ignore ; mais immédiatement après, Vendredi s’écria qu’ils alloient tirer ; & malheureusement pour le pauvre garçon, ils firent voler dans le vaisseau plus de trois cent flèches, dont personne ne fut blessé que mon fidèle valet lui-même, qui à mes yeux eut le corps percé de trois flèches, ayant été le seul qui fût exposé à leur vue.

La douleur que me causoit la perte de ce vieux compagnon de tous mes travaux, me porta à un violent desir de vengeance. J’ordonnai d’abord qu’on chargeât cinq canons à cartouches & quatre à boulets, & nous leur donnâmes un telle bordée, que le souvenir leur en est resté certainement pendant toute leur vie.

Ils n’étoient éloignés de nous que de la