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de Milord Céton.

dans le gouvernement de l’état, & qui lui fit employer la vertu dans un poste que les autres ne recherchent que dans la vue d’élever leur fortune. Que ne donnerois-je pas pour avoir un homme qui lui ressemble, afin de pouvoir prendre ses avis sur les affaires présentes, & pour entendre cette voix de la liberté au milieu des applaudissemens des flatteurs ? Je sens trop combien un conseil aussi sincère que le sien me seroit utile parmi les déguisemens de la Cour.

Ce prince, qui n’avoit rien retenu d’Alexandre, que son ambition, croyoit sans doute qu’il se seroit bientôt rendu le maître du monde avec un ministre aussi désintéressé, parce qu’on ne pouvoit ni le corrompre, ni le tromper, ni le surprendre. Que ne fit-il point aussi pour l’avoir ? Mais Démosthène, par une grandeur d’ame sans exemple, préféra la mort à toutes les caresses d’Antipater ; & prenant le poison en présence d’Archios, qui le pressoit de se rendre au pouvoir du vainqueur de la Grèce : reporte, dit-il, à ton maître que Démosthène ne veut rien devoir au tyran de sa patrie. Telle fut la probité de ce grand homme, dont Lucien fait un éloge parfait. Par son éloquence il eut l’art de se rendre maître de l’esprit du peuple le plus fier, le plus inconstant & le plus intraitable qui fût jamais. Cette populace mutine & jalouse du mérite de ceux qui se distinguoient dans sa républi-