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la bouche que pour appuyer l’autorité des loix & pour le service de l’état ; l’honneur & la probité dont il faisoit profession, l’invocation des Dieux qu’il ne manquoit jamais de faire dans ses harangues, lui avoient procuré cette opinion de piété & de religion qui fait de si grands effets sur les esprits, parce que cette vertu est la règle & la mesure de toutes les autres.

Rien ne contribua davantage au crédit de Démosthène, que la liberté qu’il prit de déclamer contre Philippe. Il est certain qu’on ne peut rien imaginer de plus glorieux à un simple citoyen d’Athènes, que la hardiesse qu’il montra en se déclarant contre un roi déjà si puissant dans sa république, qu’il en partageoit tous les esprits ; mais le pouvoir de ce prince, ses armées, ses menaces, ni ses promesses ne purent jamais l’ébranler ; & tout l’or de Macédoine ne fut pas capable de l’éblouir ; il fut toujours impénétrable aux offres qu’on lui fit faire pour tâcher de le corrompre, ce qui fit dire à Antipater, successeur d’Alexandre, que s’il avoit eu un ministre aussi incorruptible que Démosthène, il auroit été invulnérable. Qu’il y a de souverains qui à juste titre pourroient en dire autant !

Ce qu’ajoute Antipater donne encore une plus grande idée de la vertu de cet orateur : c’est, dit-il, le seul amour de sa patrie qui l’a fait entrer