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de Milord Céton.

de quelques villageois, l’établissement d’une bicoque, qui forment les travaux tant vantés du pieux Enée, que le poëte a ennoblis, & qui a su, en les ennoblissant, les rendre encore plus intéressans par une illusion trop fine pour ne pas se dérober au commun des lecteurs. Ce poëte embellit les mœurs héroïques, mais il les embellit sans les déguiser. Le pâtre Latinus, & le séditieux Turnus sont transformés en monarques puissans ; toute l’Italie craint pour sa liberté ; Enée triomphe des hommes & des dieux, & Virgile sait encore faire rejaillir sur les Troyens toute la gloire des Romains, & le fondateur de Rome fait disparoître celui de Lavinium. C’est un feu qui s’allume, bientôt il embrasera toute la terre. Enée, si l’on peut hasarder l’expression, contient le germe de tous ses descendans. Mais jamais Virgile n’emploie mieux son art que lorsque descendu aux enfers avec son héros, son imagination en paroît affranchie. Le génie nous fit voir les Géorgiques, que nous lûmes avec ce goût si vif qu’inspire le beau, & avec ce plaisir délicieux que l’aménité de leur objet inspire à toute ame honnête & sensible. On peut dire qu’Horace & Virgile fixèrent le goût des Romains.

Nous quittâmes Virgile pour suivre le génie, qui nous conduisit dans un autre appartement où s’étoient rassemblés Épicure, Pline, Lucien, &