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de Milord Céton.

tranchât par la suite, des discours qui lui seroient adressés, tout ce qui sentiroit l’adulation & la flatterie. Ce n’est pas, ajouta cette princesse, que je ne sois sensible aux louanges, sur-tout lorsqu’elles me sont données par un aussi bon juge de la vertu : mais je crains de les aimer trop, & je ne dois pas oublier que souvent elles nous corrompent, nous rendent vains & présomptueux ; je dois donc employer tout le tems de ma vie à les mériter : mais celles qui me seront les plus agréables & les meilleures que vous puissiez me donner, seront toujours celles que vous publierez en mon absence, si je suis assez heureuse pour en mériter.

Quelques jours après, inquiet de l’absence du génie que nous n’avions point vu depuis notre retour de l’armée, je m’en plaignis amèrement. J’étois seul avec la reine : seroit-il possible, lui dis-je, que Zachiel nous eût si cruellement abandonnés, sans nous en avertir ? Ne pourrons-nous donc jamais goûter de plaisirs sans qu’ils soient mêlés d’amertume ? Je ne le puis croire, dit cette princesse ; & quoiqu’il nous ait prévenus sur son départ, il n’ignore pas que peu fermes dans l’art de régner, il nous doit encore des conseils ; nous sommes l’un & l’autre son ouvrage, c’est de lui que nous tenons tous les talens qu’il doit nécessairement tâcher de perfectionner.