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de Milord Céton.

soin fut de me rendre chez Cléontine, qui me reçut avec une amitié qui me fit juger que l’absence n’avoit rien diminué des tendres sentimens qui nous unissent. Cléonbule fit éclater aussi la joie qu’il avoit de me revoir.

Au bout de quelques tems, je m'apperçus de beaucoup d’altération dans l’humeur de Cléontine ; une sombre mélancolie s’étoit emparés de son cœur ; je la trouvois souvent triste & rêveuse ; j'en fus inquiète & la pressai de s’ouvrir à moi. Que tardez-vous, lui-dis-je, de répandre dans le sein d’une amie, des peines dont je ne m’apperçois que trop que votre ame est pénétrée ? Peut-il y avoir quelqu’un dans le monde qui soit plus propre à les partager qu’une amie qui vous a toujours été dévouée ? Hélas ! ma chère, s’écria Cléontine en m’embrassant, je connois vos sentimens & je ne doute point de votre amitié : mais en aurez-vous assez pour vous déterminer à changer mes peines en allégresse ? Que ce doute est offensant, repris-je ! Attendez, dit Cléontine en me regardant fixement, vous ignorez encore toute l’étendue du sacrifice que je n’ose exiger ; écoutez-moi, Floride, & répondez sans détour à mes questions.

J’ai long-tems soupçonné la qualité des sentimens que mon père a pour vous, son amitié ressemble si fort à l’amour, que j’ai craint de m’y méprendre. Quoi, repris-je avec étonnement ! vous