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de Milord Céton.

ne put supporter plus long-tems ce silence ; elle s’empressa de le rompre : qui peut, lui dit-elle, causer l’émotion où je vous vois ? Parlez, hâtez-vous de m’instruire. Il est vrai, belle Cléontine, que jamais personne n’a peut-être encore éprouvé les perplexités que je ressens, cependant un mot favorable de votre bouche les changeroit dans l’instant en une félicité parfaite. J’ignore de quelle espèce sont vos peines, dit Cléontine, mais s’il dépendoit de moi de les alléger, vous ne devez pas douter que je ne m’y emploie avec tout le zèle dont je suis capable. Une réponse aussi favorable remit le calme dans l’ame de Clitandre & l’enhardit à déclarer sa passion.

Il est des ames qui semblent liées par des chaînes secrètes & qui s’entendent à demi-mot. Cléontine ignoroit l’art de feindre ; son cœur étoit simple & toujours guidé par la nature ; la froideur & la contrainte en étoient bannies ; jamais elle n’eut la petitesse de s’abandonner à des soupçons, l’amour de son amant lui parut aussi désintéressé que le sien, elle écouta ses sermens avec un plaisir qu’elle ne chercha point à dissimuler, & ne fit voir dans sa réponse que l’impression de ses sentimens. Clitandre fit alors éclater les transports de sa joie par mille discours sans suite. Pouvoit-il mieux prouver son amour ? Le soir il remonta & cheval pour aller apprendre & Cléonbule que son