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de Milord Céton.

Hommes audacieux ! comment osez-vous entreprendre d’orner la nature par des arts qui ne peuvent que l’imiter de très-loin ? Vous construisez des labyrinthes, vous formez des boulingrins, vous taillez vos arbres en magots, vous ornez vos parterres de corbeilles, & vous méprisez les prés rustiques & les bois sauvages, où la nature fait régner par de confuses variétés un ordre caché, conforme aux règles secrètes de l’harmonie & du beau, dont l’effet se fait sentir à notre ame par le plus doux ravissement.

Nous quittâmes avec peine notre vieillard & sa famille pour poursuivre notre route, pendant laquelle Zachiel nous fit observer que ces peuples, accoutumés dès l’enfance au travail, ont le corps beaucoup plus agile ; ils ont aussi plus de sérénité dans l’esprit ; leurs plaisirs sont moins vifs, mais leurs passions sont plus modérées ; ils jouissent d’une volupté tranquille qui n’a rien de sensuel, & d’une pureté inaltérable ; la frugalité augmente leur force, la tempérance les entretient, & la vertu les conduit dans toutes leurs actions : ils ont pour maxime de préparer d’avance la jeunesse à tous les accidens fâcheux du climat ; c’est, disent-ils, en diminuer l’intensité, & les préserver des impressions funestes que causent les élémens sur les constitutions foibles : c’est les sauver de mille