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de milord Céton.

différemment ; au lieu de se tolérer mutuellement parmi cette variété infinie d’opinions & de nouveaux systêmes, de souffrir avec douceur, je les ai vus se déchirer de sang-froid ; & lorsque j’y suis arrivé, l’aimable vérité y avoit perdu depuis long-tems ses plus précieux avantages sur l’erreur qui est sa rivale la plus dangereuse ; l’une & l’autre y excitoient les mêmes troubles, les mêmes tempêtes, & s’y soutenoient avec la même opiniâtreté. Ce monde enfin n’étoit devenu plus riche & plus magnifique que pour être plus vicieux ; il n’avoit multiplié ses loix que pour se donner le plaisir de les enfreindre avec plus de hardiesse. Ils ne cultivoient les beaux arts que pour s’abandonner avec plus de licence au luxe & au dérèglement qui l’accompagne ; ils n’honoroient que la bassesse, n’élevoient que la médiocrité aux plus hautes dignités, & ne récompensoient que la mauvaise administration, en écartant de leurs conseils les personnes d’esprit & ceux dont les talens sont supérieurs, prétendant que trop inquiets, ils altéroient le repos de l’état : mais ce repos qu’ils ont dû comparer à ces tems calmes qui dans la nature précédent souvent les grandes tempêtes, ne servoit qu’à faire naître de nouveaux tyrans qui se faisoient un plaisir malin de dominer sur leur vie & sur leur liberté, qui, en leur attachant leurs biens, ne vouloient pas seulement se donner la peine de les tromper sous de