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de milord Céton.

l’empereur, il y a apparence qu’elle veut employer le secours de la jalousie pour le faire rentrer dans ses chaînes ; mais comme il faut aimer pour en prendre, cette voie lui deviendra inutile, & tant que la passion de ce prince durera pour Monime, tous les efforts qu’elle fera pour le ramener vers elle seront vains ; la façon de penser de ce monarque est entièrement changée depuis qu’il adore Monime, ses sentimens sont devenus beaucoup plus délicats ; son goût pour l’amour n’en est pas moins vif, mais il est plus épuré, par conséquent plus tendre, plus passionné & plus voluptueux, il veut être aimé pour lui-même. Les princes sont rarement sûrs de cet avantage sur-tout dans cette cour où l’amour des grandeurs & celui des richesses sont les seuls mobiles qui les font agir.

Remarquez, mon cher Céton, poursuivit le génie, un courtisan qui fait son séjour ordinaire auprès du prince, d’abord il se forme un talent particulier de le bien connoître : le prince n’a point d’inclination qui lui soit cachée, point d’aversion qu’il ne pénètre, ni point de foible qu’il ne découvre ; de-là viennent ces infatuations, ces complaisances & toutes ces mesures délicates qui forment l’art de gagner les cœurs & de se concilier les esprits ; le prince qui n’est point en garde contre ces artifices, prend souvent pour zèle ce qui n’est