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de milord Céton.

exil avec indifférence, je ne l’ai même soutenu qu’avec beaucoup de peine, sensible à l’affront que j’ai reçu, une affreuse mélancolie, en me séparant de la cour & me privant en même tems de toute société, avoit, pour ainsi dire, engourdi toutes les facultés de mon ame ; mon amour propre, trop humilié par cette chûte, ne me laissoit aucune liberté de réfléchir sur moi-même. Vous venez tout à coup de dessiller mes yeux, en me faisant sentir le prix de la vertu, le danger des honneurs & la sottise des préjugés dans lesquels je vivois ; que de graces ne dois-je pas vous rendre pour tant de bienfaits !

Cependant, dit Zachiel, vous aviez plus d’un motif de consolation ; vous savez que les hommes ne sont pas toujours les mêmes, ce seroit faire trop d’honneur à la nature humaine que de lui donner l’uniformité, ainsi ceux qui vous regardent aujourd’hui avec indifférence ou mépris, rechercheront peut-être dès demain, par quelque mouvement extraordinaire, les occasions de vous servir. Ces hommes changeans sont toujours remplis de mauvaises qualités, c’est pourquoi il faut en tirer ce qu’on peut : il est des insinuations honnêtes dont les moins artificieux peuvent user sans scrupule ; il y a des complaisances aussi éloignées de l’adulation que de la rudesse.

Ce Seigneur nous engagea de si bonne grâce de