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de milord Céton.

malheureux, me donne de nouvelles preuves de la bonté de votre cœur, & je vais employer la force du raisonnement pour le convaincre.

Nous nous avançâmes vers ce courtisan que le génie aborda d’un air doux & majestueux. Leur conversation roula d’abord sur des discours vagues : mais qu’un génie a de pouvoir sur l’esprit des hommes ! il est toujours sûr de les amener au point qu’il desire. Ce seigneur, qu’une force supérieure entraînoit presque malgré lui, oublia sa politique ordinaire pour se montrer tel qu’il étoit, il ouvrit son cœur au génie qui lisoit dans son ame ; que de foiblesses ne vîmes-nous pas ! que les hommes sont petits ! qu’ils sont à plaindre !

Ce courtisan, l’esprit encore tout plein de sa disgrâce, raconta à Zachiel toutes ses infortunes ; il se plaignit amèrement des trahisons & des injustes menées qu’on avoit employées pour le perdre, dont il devenoit la malheureuse victime. Zachiel, pour le consoler, se prêta d’abord à a foiblesse & parut entrer dans toutes ses raisons ; mais il les combattit ensuite avec cet esprit qui plaît, qui entraîne insensiblement & qui touche si bien le cœur lors même qu’il semble ne parler qu’à l’esprit & à la raison. Il ajouta que l’innocence & la pureté de ses intentions devoient le rassurer sur l’avenir ; que le prince les reconnoîtroit un jour, & le vengeroit de ceux qui avoient osé le noircir dans son