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de milord Céton.

des Joviniens, car, malgré ce que j’ai dit de ces châteaux si magnifiquement bâtis, & de ces dehors si soigneusement entretenus, que nous trouvâmes sur notre route, les seigneurs à qui ils appartiennent n’y paroissent presque jamais. Un grand Seigneur ne se retire point dans ses terres qu’il ne soit disgracié, quelqu’agrément que la nature & l’art y aient réuni, il s’y déplait, il y dessèche d’ennui, enfin il ne vit plus, à peine végète-t-il, & bientôt la mort vient le délivrer de cet état d’humiliation.

Nous prîmes notre route vers la capitale de l’Empire. Après quelques journées de marche, nous entrâmes dans de belles avenues qui formoient un berceau délicieux & à perte de vue. Monime trouva ce lieu si agréable, qu’elle voulut descendre de carrosse pour se promener sur une pelouse qu’on auroit prise pour un tapis d’émeraudes. À peine eûmes-nous fait une vingtaine de pas que nous apperçumes un homme qui se promenoit seul en rêvant profondément, malgré un teint jaune & livide, un air triste & languissant, sa physionomie annonçoit de la noblesse & quelque chose d’intéressant. Je suis surpris, dis-je, à Zachiel qu’on laisse ainsi ce seigneur livré à lui-même dans sa convalescence, car il me paroît qu’il vient d’essuyer une grande maladie dont il n’est pas encore entièrement rétabli ; cet air de grandeur qu’on remarque dans toute sa personne me fait croire qu’il devroit

Niv