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de milord Céton.

de plomb pour être conduites dans un endroit ; le cœur est mis dans une boîte d’or pour être porté dans un autre, & le corps a sa sépulture séparée dans un troisième lieu ; ces trois inhumations se font toujours la nuit ; il seroit trop humiliant pour l’humanité d’enterrer un mort de qualité en plein jour. Comment imaginer que les ames des grands, qui doivent assurément être privilégiées, puissent se sauver ignoblement avec la foule des simples fidelles ? Leur gloire exige qu’on réserve pour eux des cérémonies extraordinaires ; ainsi l’éclat des torches multipliées à l’infini est plus brillant dans l’obscurité de la nuit, ce qui rend la pompe funèbre plus magnifique & plus belle. Tout dans la maison, jusqu’aux chevaux & aux équipages, doit porter le deuil du défunt. Je ne sais s’il y en a un fort grand dans le cœur, en tous cas il ne dure pas long-tems ; c’est le monde où l’on est le plus aisément consolé ; & quoique les appartemens soient tendus de noir, toutes les voitures drapées, on y porte néanmoins un deuil enjoué & galant ; ce deuil n’est qu’une bienséance d’usage, parce qu’il seroit honteux de ne pas pleurer ceux à qui la nature les a joints par le sang ; c’est pourquoi ils copient les dehors d’une vraie douleur ; mais cette douleur hypocrite n’est que pour satisfaire à l’usage. Un père à qui la mort enlève un fils unique tendrement aimé, est obligé de renfermer son cha-

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