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Voyages

puis exprimer combien la noblesse est jalouse de ses droits, sur-tout de celui de la chasse ; l’étendue du pouvoir qu’ils donnent à leurs gardes, leur fait exercer tous les jours mille vexations indignes. J’ai vu plusieurs champs dévastés par les ravages que les chasseurs, leurs chevaux, leurs chiens & les animaux qu’ils poursuivent, font dans la campagne ; & la servitude où ils tiennent leurs vassaux, les empêche d’oser entreprendre de remédier à ces désordres. Un homme dont les biens joignent ceux d’un seigneur peut être assuré de ne retirer aucun profit de ses terres ; personne n’ose empiéter sur leurs droits, par les peines auxquelles ils seroient condamnés, quand on ne les trouveroit coupables que d’avoir fait peur aux animaux qui viennent jusques dans leurs jardins ravager leurs légumes & les plantes ou les arbustes qu’ils cultivent avec le plus de soin.

Nous fûmes invités, Monime & moi, d’aller passer quelques jours à la terre d’un seigneur nommé Ardillan. Ses vassaux instruits de son arrivée vinrent au-devant de lui avec pompe & magnificence ; chacun le traita de monseigneur, on lui donna de l’altesse, de la grandeur ; la presse fut grande à son souper ; & tout le tems qu’il resta dans sa terre, on s’empressa de lui faire la cour. Les gentilshommes voisins s’assemblèrent, & l’on fit plusieurs parties de chasse.

Un jour qu’il étoit question de mettre un cerf