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de milord Céton.

dans les équipages, que profusion dans les repas & que rafinement dans les plaisirs ; ils méprisent le marchand, & ce dernier prime souvent sur eux : vous avez vos titres, leur dit-il, & moi j’ai mon coffre fort, avec lequel je puis, quand je veux, acheter de la noblesse.

Les riches ont des charges qui leur rapportent des honneurs & du profit ; le peuple les monseigneurise, on leur donne du très-haut & du très-puissant ; ils ont des vassaux, de beaux parcs, de beaux châteaux, de grands hôtels & l’espérance de parvenir aux premières dignités de l’état. Que de sujets pour oublier qu’ils sont hommes ! Aussi la plupart ne regardent-ils tous ceux qui les approchent que comme des insectes dont la terre est couverte. Semblables à un certain roi des Moluciens qui se disoit roi des enfers, & vouloit qu’on appelât sa femme Proserpine, sa mère Cérès, & son chien Cerbère : de même les Joviniens se font diviniser. Ces Seigneurs affectent la simplicité dans leurs vêtemens, & se font accompagner par des domestiques dont les habits sont chamarés d'or ou d’argent.

La plupart de la noblesse, quoique fort entêtée de son nom, laisse néanmoins au peuple & à la roture le soin de fournir à l’état de nouveaux citoyens. Il est du dernier bourgeois d’avoir plusieurs enfans ; un seigneur doit se borner à un