CHAPITRE XI.
Le génie nous conduit à l’embouchure de différens fleuves.
Après nous être assez long-tems réposés sous
un épais feuillage, que des pampres chargés de
fruits & entrelacés de lierre rendoient des plus
agréables, le génie nous fit traverser un très-spacieux
vallon rempli de fleurs destinées à former les couronnes
& les guirlandes de Zéphir & de Flore. Ce
vallon nous conduisit insensiblement à l’embouchure
de trois grands fleuves qui servent à arroser
les campagnes brillantes de ce monde lumineux.
Le premier & le plus large de ces fleuves se nomme le fleuve de la Mémoire ; le second, plus étroit mais plus profond, est celui de l’Imagination ; & le troisième, beaucoup plus petit que les deux autres, est celui du Jugement.
Vous ne devez pas ignorer l’un & l’autre, dit le génie, qu’il se trouve dans l’ame plusieurs facultés subalternes qui doivent servir à la raison, qui ne doit jamais cesser d’en être la souveraine. Entre ces facultés, l’imagination tient toujours le premier rang ; c’est elle qui reçoit les impressions des