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Voyages

qu’on voit s’envoler avec les ombres dès que l’éclat du soleil vient frapper nos paupières.

Quoi, madame, me dit un jour Fenix, vous verrai-je toujours en proie à cette sombre tristesse ? Je n’en ai point été surprise lorsque vous aviez lieu de craindre pour les jours du roi votre père ; à présent qu’il est de retour, jouissez au moins tranquillement du plaisir de le revoir & des honneurs qui vous environnent de toutes parts. Que ces honneurs, chère Fenix, sont peu capables de toucher une ame comme la mienne ! Je ne puis être sensible qu’à la tendresse de mon père ; je sais que rien ne peut me la ravir. Hélas ! il vient encore de me dire que tous les soins qu’il prend pour s’affermir sur son trône & pour en chasser la division & les brigues, ne sont que dans la vue de se procurer la satisfaction de m’y voir placée ; cependant, ma Fenix, un affreux pressentiment que je ne puis vaincre, vient sans cesse empoisonner le repos de mes jours.

Mon père ne jouit pas long-tems de cette ombre de tranquillité ; la guerre se ralluma avec plus de fureur, & pour comble de maux, la famine vint encore se joindre à ce fléau. Alors tous les temples se remplirent ; chaque jour on offroit de nouveaux sacrifices pour tâcher d’appaiser la colère des dieux.

Pendant ces calamités, quelques ministres fana-