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de Milord Céton.

se retirer de si bonne heure : on proposa un camagnol, & une partie de la compagnie se mit au jeu. Monime & moi restâmes à causer avec Damon & Licidas. À propos, qu’est devenu le marquis, demanda Licidas ? Je ne le rencontre plus dans aucun endroit. Je m’attendois de le trouver ici : c’étoit ton ami. Fi donc, dit Damon ; que veux-tu que j’en fasse ? Il n’est plus reconnoissable. Tu ne sais donc pas qu’il a tout-à-fait perdu le ton de la bonne compagnie ? Il est devenu d’un uniforme, d’un ennuyeux ! c’est à périr, on n’y tient plus : je te dis que c’est une horreur, qu’il n’est pas présentable. La petite tonton m’assura hier qu’il donnoit à présent dans le sublime : il s’est affublé de tous les travers imaginables ; elle m’en fit le détail : c’est à l’infini. Tu ne te figurerois jamais jusqu’où il pousse l’extravagance : tu sais qu’il a quitté sa chanteuse. Hé ! non, je ne sais rien, dit Licidas. Ah ! parbleu, reprit Damon, tu as donc vécu dans le ventre d’une carpe, pour être si peu instruit des nouvelles ? Apprends donc que le Marquis, pour mettre le comble à ses ridicules, vient de payer ses dettes ; qu’il va se marier à une jeune personne sage, remplie de talens, & qu’on assure être d’une beauté miraculeuse, qu’il a choisie lui-même ; & que renfermé avec elle tous les jours, c’est-là où