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de Milord Céton.

teurs : ces gens, tout hérissés de langues mortes, ne sauroient nous plaire. Ils ont beau fouiller laborieusement dans les sources de la science : plus habiles qu’eux, nous la trouvons toute entière dans les journaux & les dictionnaires, qu’on peut même encore se dispenser de lire, puisque nous avons le secours des almanachs, qui nous représentent toutes les sciences en mignature : ajoutez à ces ressources nos bureaux d’esprit, où on le distribue presque pour rien.

Avec cela, j’ai autant d’érudition qu’il m’en faut pour remplir les premières places ; j’ai de l’ambition, des espérances fondées sur ma naissance & mes talens ; & on se flatte d’avoir un peu de figure. Je suis très-bien en cour ; plus de vingt femmes m’y protégent, auxquelles je tâche de prouver ma profonde vénération ; & en vérité si je renonçois à des prétentions aussi sûres, mes créanciers me croiroient ruiné, je n’aurois plus de crédit. Je suis donc forcé de faire beaucoup de dépenses pour le soutenir, de jouer, de passer les nuits avec des femmes, afin de me conserver dans la faveur. Vous voyez, mon cher milord, que l’honneur m’engage à sacrifier nécessairement la plus grande partie de mes biens, pour parvenir à quelque poste considérable : & puis n’ai-je pas encore