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avoit perdu totalement la raison, à peine végète-t-il ; le jugement égaré, il se rappelloit avec douleur son premier état ; la moitié de sa vie est pour lui un supplice affreux qui le fera peut-être mourir de vanité : on le voit enfin succomber sous le poids de l’orgueil que lui a donné le poste qu’il occupoit ; mais il n’est pas le seul que la fortune prive de jugement par ses dangereux charmes. Il est peu de gens qui aient l’ame assez forte pour se défendre des pièges qu’elle leur tend. Zachiel nous fit remarquer que l’expérience nous montre que dans tous les tems les plus grands hommes ont été sujets, ainsi que le vulgaire, au défaut de se laisser aveugler par la fortune. Ils ont justifié ce que dit Asdrubal dans le Sénat, lorsqu’il établit pour maxime certaine, qu’on voyoit très-rarement le jugement avec la bonne fortune. Ceux qui se sont le plus appliqués à connoître le cœur humain, regardent l’union de la sagesse & de la prospérité comme une chose presque impossible. L’amour propre a trop d’influence sur les hommes, pour ne leur pas persuader aisément qu’ils ne doivent attribuer qu’à leur seul mérite ce qui n’est souvent qu’un pur effet du hasard. Les plus grands hommes sont sujets aux mêmes défauts. En examinant les histoires anciennes &