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de Milord Ceton.

Les trois vieilles que vous voyez sont les parques qui filent la vie des mortels. Les hommes ne peuvent demeurer sur la terre qu’aussi longtems qu’elles mettent à finir chaque monceau. Lorsqu’elles ont achevé un écheveau, le destin y attache une petite plaque d’or, d’argent ou de plomb ; c’est ce qui désigne les bonnes ou les mauvaises qualités de celui à qui on vient de couper la trame ; son nom est gravé sur la plaque, & ses vertus ou ses vices y sont tracés en caractères ineffaçables : alors un vieillard, dont la course rapide ne peut jamais être arrêtée, en remplit les pans de sa robe & les va jetter dans le fleuve d’oubli que vous voyez dans le lointain sur la gauche de cette coline ; ce vieillard, sans se lasser, revient continuellement en reprendre sans pouvoir en diminuer le nombre : mais quand, d’un air chagrin, il s’est déchargé de son fardeau, deux cignes, plus blancs que la neige, qui se promenent sans cesse sur ce fleuve, ont soin de détacher avec leur bec les noms des mortels les plus illustres, & de les remettre entre les mains d’une nymphe dont la beauté est ravissante, & dont l’unique emploi est de les porter dans le temple de la gloire, pour y être consacrés à l’immortalité ; c’est-là qu’avec un soin extrême elle les attache autour d’un simulacre posé sur une colonne élevée au milieu du temple.