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de Milord Céton.

halte ; nous sommes à jeun, & je me sens trop foible pour aller plus loin. Que dites-vous, reprit Zachiel, en l’interrompant brusquement ? Est-ce ici qu’il faut parler de boire & de manger ? Apprenez, belle Monime, qu’au séjour de la gloire, on ne se repaît que de vent & de fumée : on ne s’enivre que de son mérite & de soi-même ; dormir à l’ombre de ces lauriers, recevoir de l’encens, jetter de la poudre aux yeux : voilà la vie & la seule occupation des héros immortels.

Monime ne parut pas goûter ce régime d’immortalité ; déjà elle se préparoit à visiter sa boëte aux confitures seches, lorsque tout-à-coup nous nous vîmes investis d’un tourbillon de fumée fort odoriférante. Survint ensuite un coup de vent, qui sembla ranimer des volcans de soufre & de salpêtre, qui répandirent dans toute cette place une nouvelle fumée, qui, se confondant avec l’autre, paroissoit enivrer tous les spectateurs. Ne pouvant soutenir la force de ce vent, Zachiel nous fit passer sous un vestibule : vous voici, nous dit-il, au milieu des héros les plus vantés de l’univers.

Notre étonnement à la vue de cette singulière compagnie ne peut s’exprimer ; des visages balafrés, des yeux crevés, des crânes ha-