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Voyages

riser les larcins des bergers. Mais je m’arrête pour laisser à l’imagination de mon lecteur le plaisir de se peindre le reste.

Nous passâmes dans l’île de la Complaisance, qui n’est habitée que par une colonie qu’on a tirée de l’île de la Politesse. Je n’y remarquai que des gens assez insipides ; tout ce qu’ils font n’est, à ce qu’ils disent, que dans la vue de s’obliger les uns & les autres. Jamais ils n’exécutent leurs volontés ; jamais ils n’éprouvent de contrariétés. Je remarquai que la paresse étoit leur vice dominant. Ces habitans ont un air de langueur qui ennuya Monime dès le premier jour, c’est ce qui nous obligea d’en sortir pour nous rendre dans l’île de la Persuasion.

Cette île est fort petite ; un génie y commande en qualité de vice-roi de la galanterie. L’emploi de ce génie est d’y entretenir tous les citoyens dans le respect qu’ils doivent à leur souveraine ; c’est lui qui assaisonne tous les plaisirs ; son esprit y est regardé comme un feu céleste qui ne paroît qu’avec éclat, qui brille, qui divertit, & invente tous les jours mille nouveaux agrémens pour plaire ; c’est par lui que la laideur devient agréable ; il procure le charme de la vie ; il est l’ame de la conversation, l’ami des arts ; c’est à ses connoissances que ces peuples doivent tous leur bonheur ; sans