Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 17.djvu/377

Cette page a été validée par deux contributeurs.
351
de Milord Céton.

je cherche moins à regagner la place que j’occupois dans votre cœur, qu’à vous faire connoître l’état du mien, & vous faire voir, en même tems, qu’il est assez bien placé pour ne vouloir pas descendre avec vous jusqu’à la justification. Elle entra ensuite dans son cabinet, & en ferma la porte assez rudement, pour éviter d’entendre nombre de mauvais propos que son amant débita avec beaucoup de volubilité. Il resta long-tems à écouter à la porte du cabinet, quoiqu’il fût très-sûr qu’il n’y avoit personne lorsque Lisis y entra, & qu’il n’y eût point d’autre issue, à moins de passer par la fenêtre & même au travers des barreaux ; car les croisées de ce cabinet étoient toutes grillées : mais quand un homme se laisse aveugler par les passions, il ne peut plus écouter les conseils de la raison.

Jusqu’alors Albion ne s’étoit point encore ingéré de donner des ordres chez Lisis ; & quoiqu’elle tînt de lui tout son bien-être, il l’avoit toujours assez respectée pour ne lui pas faire sentir le prix de ses bienfaits, se trouvant même comblé de la préférence qu’elle lui avoit accordée sur ses rivaux ; & chaque présent qu’elle recevoit avoit été regardé de sa part comme une nouvelle faveur. Ces principes de délicatesse, dont il ne s’étoit point écarté, furent