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de Milord Céton.

lui demanda Lisis ? Je ne puis concevoir ce qui peut mettre tant de trouble & d’altération dans votre esprit ; depuis plusieurs jours je ne vous vois plus que pour me quereller : je vous ai passé toutes vos disparates ; mais à la fin elles commencent à m’ennuyer. Je le crois, dit Albion d’un air furieux, & n’ignore pas que ma présence vous importune ; entièrement livrée au prince, je trouble sans doute un tête à tête qui vous doit être plus agréable que le mien ; car ne vous imaginez pas, perfide, que j’aie attendu si tard à m’appercevoir que vous m’avez sacrifié à votre nouvelle conquête ; je me suis fait assez de violence pour ne vous en rien témoigner lorsque je n’ai eu que des indices de vos trahisons. Vous pourriez ménager vos termes, dit Lisis, songez qu’ils m’offensent. Peu m’importe de vous offenser, reprit Albion ; mon intention n’a point été de vous faire des complimens, puisqu’il m’est impossible de contraindre plus long-tems mon ressentiment ; mais si vous croyez m’avoir prévenu par votre changement, je suis bien-aise de vous dire qu’il y a dèja long-tems que j’ai dégagé mon cœur de vos liens, & que je viens vous apprendre aujourd’hui que je vais le porter à une jeune personne qui est, au moins, aussi belle que vous, & qui, sans doute, ne sera jamais si perfide.