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de Milord Ceton.

languissamment mes yeux sur-tout ce qui ornoit l’appartement de mon inconstante Monime ; je ne voyois rien, ce n’étoit que les yeux de la machine, ceux de l’ame étoient éteints, & j’aurois pu croire dans ce désordre extrême que j’avois deux ames, dont l’une triste & désespérée reprochoit à l’autre la perte & l’anéantissement de ses félicités passées.

Zachiel, qui prévoyoit les maux qui devoient m’accabler, vint me secourir ; il me trouva sans aucun mouvement & m’emporta sur une terrasse qui répondoit aux appartemens de la reine. Le génie, après m’avoir ranimé d’un souffle divin, me fit sentir avec force le peu de raison que j’avois de me rendre l’esclave de mes passions. Est-ce ainsi, me dit-il, que vous profitez de mes conseils ? N’auriez-vous pas dû vous rassurer sur la parole que je vous ai donnée que Monime conserveroit toujours ce goût de l’innocence qui ne s’éteindra jamais en elle ; c’est un esprit immortel que la divinité a placé dans son cœur pour n’en point sortir. Je conviens que l’épreuve est rude ; cependant vous voyez qu’elle la soutient sans mon secours. Mais vous, qu’auriez-vous fait, si je vous eusse laissé livré à vous-même, en bute à toute la véhémence de vos passions ? Hélas, m’écriai-je, en interrompant le génie, je n’ai ja-