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Voyage

n’étois pas visible ? Cela est vrai, madame ; mais le prince me paroît si inquiet, que je n’ai pu m’y résoudre. Je vais donc le renvoyer ? Que dis-tu, ma chere Taupette ? Arrête, le prince est inquiet, & demande avec empressement à me voir. Hélas ! que peut-il être arrivé ? Ciel ! comment lui refuser un quart-d’heure ? Non, je veux éviter tout ce qui sent le manège, cela est trop opposé à ma candeur.

Monime sortit à l’instant de son cabinet pour recevoir le prince. Pardonnez, cher Taymuras, si j’ose paroître à cette heure devant vous. Pénétré du plus violent chagrin, je ne puis différer plus long-tems à vous faire part de mon désespoir : la reine s’oppose à mon bonheur ; elle me défend de m’unir à vous ; votre qualité d’étrangère en est seule la cause : mais si vous m’aimez, si votre tendresse égale la mienne, & si les assurances que vous m’en avez données ne m’ont point trop flatté, refuserez-vous de couronner mes feux ? Consentez, divine princesse, que je vous donne ma foi, & que je reçoive la vôtre à la face des autels. Pourquoi hésiter ? L’amour n’a rien qui doive vous faire rougir ; sa flamme est dans la nature, tous les cœurs lui doivent un tribut.

Monime, surprise & embarrassée, ne répondit rien. Objet digne des dieux, poursuivit le