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de Milord Céton.

sont capables ; mais si elles découvrent que cet amant les a trahies, s’il porte ses attentions sur un autre objet, s’il les quitte, s’il les méprise, alors la douleur qu’elles conçoivent d’une infidélité qu’elles croient n’avoir pas méritée, change bientôt leur amour en une haine irréconciliable ; & cet amant doit s’attendre à essuyer tous les traits d’une fureur implacable, tous les ressorts de la vengeance sont employés pour le perdre, & les conditions d’un nouveau traité ne se sont que dans la vue d’y parvenir.

Que je trouve, dis-je au génie, de différence dans la façon de penser qui règne aujourd’hui dans notre monde : chez nous un grand cœur est moins touché de la beauté que de l’esprit ; on veut des sentimens & de la délicatesse, on regarde l’esprit comme le sel de la galanterie. Il est vrai que d’abord une jolie figure engage, mais un bon caractère arrête. Sans un discernement fin & de la solidité dans l’esprit, la beauté devient insipide ; il faut, pour plaire longtems, joindre à ces premières qualités l’enjouement, la politesse, la complaisance & l’égalité d’humeur ; ce n’est que par ces qualités réunies qu’on peut se flatter de fixer l’homme le plus inconstant, s’il est assez raisonnable pour préférer les plaisirs purs, qui n’ont leur source que dans le mêlange des ames, qui ne peuvent