Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 17.djvu/317

Cette page a été validée par deux contributeurs.
292
Voyages

les hommes. On sait que lorsqu’un petit-maître devient infidele, sa conduite est justifiée par tous ceux de son espèce ; personne ne s’avise de se récrier sur sa perfidie, & la maîtresse qu’il a abandonnée devient un triomphe de plus pour lui : mais si cette maîtresse veut se venger de l’infidèle en lui substituant un nouvel amant, c’en est fait, c’est une coquette, une volage, une perfide, & toute la nation des amans la condamne sans retour. La même action qui fait la gloire de l’homme perd à jamais la femme qui a été assez malheureuse d’avoir du goût pour lui & de se confier à sa probité.

Cependant on crie sans cesse contre les femmes ; on les accuse d’inconstance & d’infidélité, on leur demande une vertu à toute épreuve, & ces hommes injustes qui ont fait les loix veulent les réduire dans un dur esclavage, tandis qu’ils s’accordent à eux-mêmes une pleine liberté ; qu’arrive-t-il de-là, ce qu’on voit tous les jours, c’est-à-dire, qu’un mari bouru, jaloux, bisare, bigot ou avare se figure mille chimères, & prend les visions frénétiques dont il est agité, pour des réalités qu’il publie hautement ; alors toute la société maritale prend son parti, ils condamnent l’épouse sans l’entendre, & toutes les femmes en général