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de Milord Céton.

d’en être les admirateurs ; le charme tombe ; les traits que darde le fol amour ne sont plus que des traits émoussés que le vent emporte ; un coup-d’œil méprisant rend ses armes inutiles, il n’y a plus que les esprits foibles qui s’y laissent éblouir.

En approchant du palais de la reine, je crus voir l’île enchantée d’Armide, ou les jardins de Flore. Nous entrâmes d’abord dans une belle avenue ; les arbres qui la composent font admirer l’énorme hauteur de leur crime ; en élevant les yeux jusqu’au faîte, on doute si la terre les porte, ou si eux-mêmes ne portent point la terre suspendue à leurs racines : on diroit que leurs fronts orgueilleux est forcé de plier sous la pesanteur des globes célestes, & qu’ils n’en soutiennent la charge qu’en gémissant ; leurs bras étendus vers le ciel semblent l’embrasser, & demander aux étoiles la bénignité toute pure de leurs influences, afin de les recevoir sans qu’elles aient rien perdu de leur innocence dans le lit des élémens. On voit de tous côtés dans cet endroit délicieux des fleurs qui, sans avoir eu d’autre jardinier que la nature, répandent une odeur agréable, qui réveille & satisfait en même tems l’odorat ; souvent on est embarrassé de choisir entre la rose, le jasmin, le chevrefeuille ou la violette.