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de Milord Céton.

la douleur avoit presque étouffée : elle étoit renversée dans un fauteuil, ses bras étendus sans mouvement ; une pâleur mortelle étoit répandue sur son visage, qui paroissoit baigné de ses larmes.

Ce spectacle m’attendrit jusqu’à en répandre moi même ; il fixa toute mon attention, & malgré l’état où je la voyois, je lui trouvai de la noblesse dans la physionomie, des graces, un air de douceur ; & je crus voir enfin la douleur en personne. Je fus d’abord tenté d’appeler les femmes de Monime pour la secourir, & me sauver en même tems de l’intérêt douloureux qu’elle commençoit à m’inspirer en sa faveur ; mais je ne pus m’affranchir de la pitié que je ressentois ; il auroit fallu prendre trop sur mon cœur, & ce ménagement pour moi-même m’auroit mis beaucoup plus mal à mon aise que la plus triste sensibilité pour ses malheurs.

Je m’approchai donc respectueusement dans le dessein de la consoler. Pardonnez ma hardiesse, lui dis-je ; je ne viens point ici, mademoiselle, dans la vue de vous causer aucune peine : pénétré jusqu’au fond de l’ame de l’état où je vous vois, je voudrois de tout mon cœur pouvoir adoucir vos maux. Par pitié pour vous-même, soulagez votre douleur,