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de Milord Céton.

CHAPITRE V.

Portrait d’un Libertin.


Vis-a-vis de notre hôtel logeoit un jeune homme, nommé Specade, qui passoit pour un des plus riches seigneurs de la province. Son père en avoit été gouverneur, & lui avoit laissé d’immenses richesses, & plusieurs belles terres d’un revenu considérable. Ce jeune homme faisoit dans cette ville une dépense d’ambassadeur, qui montoit à plus du double de ses revenus. Son intendant & son maître-d’hôtel, tous deux d’accord pour profiter de sa dissipation & de son peu d’expérience, travailloient de concert pour s’enrichir à ses dépens ; & quoiqu’ils eussent chacun une maîtresse entretenue sur le bon ton, ils y parvinrent facilement, par le secret de leur industrie. Le cuisinier, à l’exemple des deux autres, ne s’endormit pas : il faisoit tous les jours porter chez sa nymphe toutes sortes de provisions, qu’il trouvoit, sans doute, superflues pour la table de son maître. On peut juger que de pareils économes ne contribuèrent pas peu à la ruine de ce jeune homme.

Specade apperçut un jour Monime à son