Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 17.djvu/227

Cette page a été validée par deux contributeurs.
202
Voyage

habit de femme, en faisant courir le bruit qu’il étoit passé aux îles ou au Pérou, pour y faire valoir l’argent qu’il emportoit. La banqueroute du baron de Friponot fut bientôt déclarée, & en entraîna malheureusement une vingtaine d’autres. Une année s’est passée en négociations avec ses créanciers, qui ont à la fin accepté dix pour cent de leur créance, & monsieur le baron de Friponot a reparu dans le monde plus brillant que jamais. En vérité, dit Monime, cet homme est plus coupable qu’un voleur de grand chemin : comment osez vous être en commerce avec un tel fripon ? Je puis vous assurer, madame, reprit la veuve, que cet homme est très-bien reçu par-tout : ce n’est encore que sa première banqueroute ; mais je soupçonne qu’il se dispose à en faire bientôt une seconde qui achèvera de l’enrichir ; au surplus, vous savez que l’opinion fait tout chez les hommes ; chaque pays a la sienne : celle qui est ici le plus en vogue, c’est d’honorer les riches ; tout le monde s’accorde sur ce point ; les pauvres les honorent, parce qu’ils y trouvent leur profit, & les riches leur satisfaction : ainsi chacun a son but.

Plusieurs jours se passèrent à visiter les plus beaux endroits de la ville, & le soir en rentrant nous étions sûrs de trouver chez la veuve une nombreuse compagnie, parce qu’elle donnoit