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de Milord Céton.

étrangers, qu’un homme qui n’avoit autrefois d’autres emplois, que celui de conduire des ânes au moulin, est l’aïeul d’un comte, sûrement comte, pour rire. Quoi qu’il en soit, ce nouveau comte est décoré d’un suisse, des secrétaires remplissent ses premiers cabinets ; des valets de chambre ornent les antichambres ; il a maître d’hôtel, cuisiniers, chefs d’office ; sans doute, un écuyer ; & que sais-je encore ? plus de quarante hommes de livrée ; des gardes de chasse ; une meute ; des armoiries ; il achete tous les marquisats & les comtés qui sont à vendre, enfin un duc marchande depuis longtems sa fille. Je crus que le grand-prêtre & sa femme en étoufferoient de colère : on chassa la pauvre misérable, en la traitant de folle.

Venir ainsi ternir la gloire d’un homme dans le moment que plusieurs généalogistes sont payés pour travailler de concert à le faire descendre d’une des plus anciennes noblesses du royaume ; d’un homme qui pense que nul des mortels n’est capable de se dire son égal ; d’un homme enfin qui se croit d’une nature très-supérieure aux autres par son orgueil, quoiqu’il ne soit d’artificieux, fourbe, rusé & trompeur : ne doit-on pas pardonner à un homme vertueux & malheureux tout ensemble, le secret dépit qu’il ressent de voir qu’il n’y ait que les méchans qui prospèrent ?

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