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Voyage

gare & se perd dans les maximes nouvelles & incompréhensibles qu’on suit aujourd’hui dans toute la Cillénie. Il semble que ces peuples aient eux-mêmes conjuré leur perte, pour agir directement contre leurs véritables intérêts. Ce qu’on voit arriver chaque jour apprend à ne plus douter de rien : leur esprit s’est changé en un feu pétulent, qui les empêche de réfléchir : leur conduite, écartée du point fixe de l’ancien gouvernement, ressemble à une machine hors de son pivot, qui n’a plus d’assiette certaine, ni de consistance assurée. Cette supériorité qu’ils portoient jusqu’à la domination sur tous leurs alliés desquels ils se faisoient craindre & respecter, ne les touche plus. Ce tems, où ils donnoient non des conseils charitables, mais des loix & des ordres qui portoient les autres à l’obéissance, est passé pour eux : c’étoit leur âge d’or. Ainsi vous pouvez à présent, mon cher Céton, comparer la conduite des Cilléniens à un vaisseau démâté, dont les pilotes, mal d’accord entr’eux, au lieu de s’occuper aux manœuvres générales qui pourroient le sauver, ne songent qu’à leurs intérêts, & à leur salut particulier.