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de Milord Céton.

vous venez de voir, n’est encore qu’un foible tableau de la misère qui règne actuellement dans presque toutes les campagnes. Reprenez, belle Monime, votre humeur enjouée, poursuivit le génie en souriant, accoutumez-vous à prendre les façons de ce monde, & sachez qu’ici tous les cœurs se roidissent contre la charité & l’humanité. On n’y fait point l’aumône. Au milieu d’un luxe qui annonce la plus grande opulence, on dit tranquillement à un pauvre qu’on n’a rien ; & loin d’être touché de leurs maux, on ne les soulage que par des bénédictions.

Nous découvrîmes enfin une grande ville, que Zachiel nous dit être une des capitales de la Cillénie. Arrivé à l’entrée d’un fauxbourg, je fus extrêmement surpris de voir arrêter tous nos équipages, ouvrir & renverser quelques-unes de nos malles. Monime, qui les prit pour des voleurs, parut d’abord saisie de crainte ; mais le génie, pour la rassurer, lui dit, que ces hommes étoient préposés pour visiter tout ce qui entroit dans la ville. Je trouve, dit Monime, cette curiosité fort extraordinaire, qu’il faille que des gens que nous ne connoissons point, fassent l’inventaire de nos effets : quel usage en veulent-ils faire ? Apprenez, dit Zachiel, que ces gens cherchent a s’emparer