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mes yeux : un froid mortel se gliffe dans tous mes membres, et ma haine est toujours la même. Mon cœur est glacé : j’expire, et mon dernier soupir est une imprécation contre le scélérat qui eut la cruauté de m’abuser, et la barbarie de divulguer ma honte... Cette infortunée périt en effet, peu de jours après, victime de mon horrible indiscrétion. Tout Corinthe la pleura. Je fus moi-même effrayé, attendri d’une mort aussi subite, aussi violente. Cette aventure funeste fit grand bruit, et mit le comble à mes infamies. La justice Divine, trop lente à me punir, fit enfin éclater sa vengeance. Puissent les malheurs que j’ai éprouvés, effrayer et corriger ceux qui mènent une vie souillée par un libertinage honteux et avilissant.

Je dissipai en fort peu de tems ma fortune. Je tombai tout-à-coup dans la plus affreuse misère ; mes faux amis se démasquèrent dans ce moment critique, s’éloignèrent promptement, et m’abandonnèrent dans la plus grande solitude. Je n’avois plus de ressources. Je fis alors de tardives réflexions ; une lumière importune vint briller à mes yeux fascinés, jusqu’à cet instant fatal. Mon repentir amer m’arracha des larmes. J’eus horreur de mes désordres passés. Le chagrin le désespoir s’emparèrent