Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/525

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
518
Les aventures

point de fusils. Oui, répartit-il, point de fusils, mais nous tirer beaucoup grand longs flêches.

Il est certain qu’il avoit tenu parole, & que cette comédie nous avoit donné beaucoup de plaisir. Cependant j’en aurois encore ri d’un meilleur cœur, si je ne m’étois pas trouvé dans un lieu sauvage, où les hurlemens des loups me donnoient beaucoup d’inquiétude. Le bruit qu’ils faisoient étoit épouvantable, & je ne me souviens pas d’en avoir jamais entendu un pareil, qu’une seule fois sur le rivage d’Afrique, comme je crois l’avoir déjà dit.

Si ce bruit affreux, & l’approche de la nuit, ne nous avoient tirés de-là, nous aurions suivi le conseil de Vendredi, en écorchant la bête, dont la peau valoit bien la peine d’être conservée ; mais nous avions encore trois lieues à faire, avant que d’arriver au gîte, & notre guide nous pressoit de pousser notre voyage.

Toute cette route étoit couverte de neige, quoiqu’à une moindre épaisseur que les montagnes, & par conséquent elle étoit moins dangereuse. Mais en récompense les loups enragés par la faim étoient descendus par bandes entières dans les plaines & dans les forêts, & avoient fait des ravages affreux dans plusieurs villages, où ils avoient tué une grande quantité de bétail, & dévoré les hommes mêmes.