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de Robinson Crusoé.

Je fis mes efforts pour rendre sensible à mon sauvage la fraude de leurs prêtres, en lui disant que leur prétention d’aller parler à Benakmukée & d’en rapporter les réponses, étoit une fourberie, ou bien s’ils avoient réellement de pareilles conférences, que ce ne devoit être qu’avec quelque mauvais génie. J’eus par-là occasion d’entrer dans un discours détaillé concernant le diable, son origine, sa rébellion contre dieu, sa haîne pour les hommes, qui le porte à se placer parmi les peuples les plus ignorans pour s’en faire adorer, les stratagêmes qu’il emploie pour nous duper, la communication secrette qu’il se ménage avec nos passions & nos penchans, & sa subtilité à accommoder si bien ses piéges à nos inclinations naturelles, que nous devenons nos propres tentateurs, & que nous courons à notre perte de notre propre gré.

Les idées justes que je m’efforçois à lui donner du diable, ne faisoient pas sur son esprit les mêmes impressions que les notions de la divinité. La nature même l’aidoit à sentir l’évidence de mes argumens, touchant la nécessité d’une première cause & d’une providence, comme aussi touchant la justice qu’il y a à en rendre hommage à celui à qui nous devons notre existence & notre conservation. Mais il étoit fort éloigné de trouver