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de Robinson Crusoé.

commencement il avoit tout aussi grande peur de moi que de ceux à qui il tâchoit d’échapper. J’avançai cependant sur eux à pas lents, & ensuite me jetant brusquement sur le premier, je l’assommai d’un coup de crosse ; j’aimois mieux m’en défaire de cette manière-là, que de faire feu sur lui, de peur d’être entendu des autres, quoique la chose fût fort difficile à une si grande distance, & qu’il eût été impossible aux sauvages de savoir ce que signifioit ce bruit inconnu.

Le second voyant tomber son camarade, s’arrête tout court comme effrayé ; je continue d’aller droit à lui ; mais en approchant, je le vois armé d’un arc, & qu’il y met la flèche ; ce qui m’oblige à le prévenir, & je le jette à terre roide mort du premier coup. Pour le pauvre fuyard, quoiqu’il vît ses deux ennemis hors de combat, il étoit si épouvanté du feu & du bruit qui l’avoient frappé, qu’il s’arrêta tout court sans bouger du même endroit, & je vis dans son air effaré, plus d’envie de s’enfuir de plus belle, que d’approcher. Je lui fais signe de nouveau de venir à moi ; il fait quelque pas, puis il s’arrête encore, & continue ce même manège pendant quelques momens. Il s’imaginoit sans doute qu’il étoit devenu prisonnier une seconde fois, & qu’il alloit être tué comme ses deux ennemis. Enfin, après lui avoir fait signe d’approcher pour la troisième fois,