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XLVI
RONDEAUX

admise pour les vers décasyllabiques, et peut-être aussi sous l’influence de la graphie des copistes, qui dans les manuscrits ne représentent les refrains que par leurs premiers mots, on agit de même pour les autres vers : le rondeau « doibt rentrer et reprendre les 2 premieres lignes du premier couplet ou bien le premier mot et aulcuneffoys le premier et le second », nous dit Gracien du Pont[1]. De la sorte, comme nous le verrons tout à l’heure, dans tous les rondeaux doubles aussi bien que dans les rondeaux quatrains, le rentrement se substitua peu à peu au vers de refrain pour devenir la règle générale au xvie siècle dans une forme typique de rondeau double, qui devait devenir le rondeau proprement dit, le seul que la poésie moderne connaisse.

Les manuscrits ne représentent jamais le refrain quel qu’il soit que par son premier mot ou ses premiers mots ; comment distinguer s’il doit y avoir refrain ou rentrement ? C’est le sens qui doit ici nous guider, comme déjà il nous a guidés quand il s’est agi de remplacer le refrain complet par le refrain incomplet. Prenons pour exemple le rondeau no xiii de notre recueil, dont le premier vers est :

Vostre grief mal si est le mien.


Il est de toute évidence que ce vers répété en entier après le deuxième couplet ne signifierait rien :

En regardant vostre maintien,
Mon povre cueur a sans doutance
Vostre grief mal si est le mien,


tandis que le rentrement donne le véritable sens :

En regardant vostre maintien,
Mon povre cueur a sans doutance
Vostre grief mal.

  1. Op. cit., fol. xxiii vo.