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XLI
INTRODUCTION

Au contraire, dans les œuvres de Christine de Pisan, qui appartient à la fois au xive et au xve siècles, le rondeau affecte des formes multiples non seulement dans sa structure, mais aussi dans la mesure du vers, qui peut comprendre 10, 8, 7, 4, 3, 2 syllabes et même une seule[1]. Les couplets deviennent plus longs et par suite les refrains s’écourtent ; au lieu de répéter la moitié du premier couplet à la fin du second et le premier couplet tout entier à la fin du troisième, les poètes prennent l’habitude, surtout pour les rondeaux ayant plus de 5 vers au premier couplet, de ne répéter qu’un ou deux vers à la fin des deuxième et troisième couplets, « tout à la voulenté du facteur», comme le dit plus tard Pierre Fabri[2]. L’ancienne forme persiste toutefois encore longtemps, car on en a de nombreux exemples dans Charles d’Orléans et aussi dans la poésie dramatique.

Il est du reste toujours assez difficile de voir si une pièce possède ou non ses refrains complets, car dans les manuscrits les refrains sont ordinairement indiqués par leurs premiers mots suivis d’un etc. ; dans quelques manuscrits plus soignés, comme ceux de Charles d’Orléans, chaque vers du refrain est représenté par son premier mot et un etc. ; en ce cas, il est bien clair qu’on peut aisément reconstituer le refrain tel qu’il était. Mais ce n’est là qu’une exception, et la plupart du temps on n’a guère d’autre guide que le sens de la phrase. Pour Christine de Pisan, chez laquelle les rondeaux semblent de préférence n’avoir qu’un vers de refrain, nous nous contenterons,

  1. Œuvres poétiques de Christine de Pisan, p. p. Maurice Roy, t. I (1886), p. 147-185.
  2. Le grand et vray art de plaine rethoricque (éd. Estienne Caveiller, Paris, 1539), fol. xxxii.