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introduction

bué à l’intervention personnelle du chroniqueur, on ne peut nier que la chanson que l’on connaissait à Waulsort à la fin du xie siècle et celle que nous publions représentent deux états sensiblement différents du même poème. Nous pouvons donc, dès maintenant, établir que notre chanson a passé par trois états à tout le moins :

1o Le poème primitif de Bertolais ;

2o Le poème connu par le chroniqueur de Waulsort ;

3o Le poème qui nous est parvenu.

Le grand intérêt du morceau de la chronique de Waulsort que nous venons d’étudier consiste dans les notions qu’il nous fournit sur l’état de notre poème à une époque relativement rapprochée de sa composition primitive. Il offre un autre genre d’intérêt en ce qu’il nous montre avec quelle facilité les chroniqueurs acceptaient comme histoire réelle des compositions où la fiction avait une très grande part. Ce n’était donc pas seulement aux yeux des illettrés que les chansons de geste passaient pour de l’histoire.

D’autres témoignages montrent que pendant longtemps les historiens ont cru aux récits fabuleux que les jongleurs récitaient sur Raoul de Cambrai.

Du Chesne a publié dans le t. II de ses Historiæ Francorum scriptores, pp. 588-9, un morceau qu’il a intitulé Fragmentum historicum de destructionibus ecclesiœ Corbeiensis, où sont énumérées quatre destructions successives du monastère de Corbie. Ce court récit n’est point daté, mais, à en juger par la forme vulgaire de quelques noms qu’il renferme et la forme latine de certains autres, il ne saurait être antérieur au xie siècle, ni postérieur à la première moitié du xiiie. On y lit :