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xiv
introduction

Bernier. Et il lui demande des nouvelles de Julien. Corsuble ne peut lui en donner. Mais il y avait là, parmi les prisonniers, un vieillard qui jadis avait recueilli à Saint-Gilles Julien nouveau-né, qui l’avait élevé, et maintenant se lamentait en pensant que son fils adoptif allait être mis à mort. Le voyant pleurer, Bernier l’interroge et reconnaît, d’après ses réponses, que Corsabré, celui qu’il a vaincu et fait prisonnier, n’est autre que son fils Julien. Il obtient de Corsuble que le jeune homme lui soit rendu, et retourne en France comblé de présents. Chemin faisant, il s’arrête à Saint-Gilles. Le seigneur du lieu, qui avait autrefois tenu l’enfant Julien sur les fonts baptismaux, s’engage à laisser après lui sa terre à son filleul. Bernier et Julien arrivent à Saint-Quentin où ils sont accueillis avec joie par Béatrix et le jeune Henri. Le vieux Guerri d’Arras lui-même, qui s’était tenu à l’écart depuis le moment où Bernier avait repris sa femme à Herchambaut, se rend auprès de son gendre qui consent à lui pardonner sa conduite déloyale d’autrefois. Cependant Béatrix n’est pas sans défiance à l’égard de son père. Au bout de quelques jours, Bernier et Guerri ont l’idée de se rendre tous deux en pèlerinage à Saint-Jacques. Béatrix les voit partir ensemble avec inquiétude. Elle engage vivement son époux à se tenir sur ses gardes. Les deux barons accomplissent leur pèlerinage. Au retour, comme ils passaient près d’Origny, Bernier poussa un soupir. Guerri lui en demande la raison. Bernier hésite à répondre ; poussé par Guerri, il lui dit : « Il me souvient de Raoul le marquis. Voici le lieu où je l’ai tué. » Guerri fut saisi d’un profond ressentiment qu’il dissimula d’abord. Mais le soir, comme ils s’étaient arrêtés pour faire boire leurs chevaux, il décrocha sans bruit l’un de ses étriers, et, frap-