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VI
préface

sûrement pas dans l’obligation d’avoir à protéger une poignée de French colonials, et contre les Américains, et contre les Anglo-Canadiens.

C’est là la réalité de notre situation. Elle nous commande de mettre une sourdine à nos professions de loyalisme, tout aussi intempestives que ce lieu commun de l’obligation d’apprendre et de parler l’anglais, si bien démoli par notre Sauvage. Là-dessus, il a mille fois raison ! Avec quelle verve, quel bon sens, il passe à travers cette toile d’araignée dont nous étions en train de faire la trame la plus solide de l’argumentation de nos adversaires !

Relisez les discours des « défenseurs de nos droits », dans le débat sur la motion Lapointe, au parlement fédéral. Tous ont donné dans le piège. Le seul qui n’y soit pas tombé à pic, c’est M. Lamarche. « L’enseignement du français, a-t-il dit, est pour nous un devoir ; l’enseignement de l’anglais, une nécessité. » Ce n’est pas mal. Il eût été mieux encore de dire : « L’enseignement du français est pour nous un droit, un devoir et une nécessité ; l’enseignement de l’anglais est un avantage. Nous voulons exercer notre droit d’apprendre le français ; nous voulons également jouir de l’avantage d’apprendre l’anglais ; mais personne n’a le droit de nous y contraindre. »

Tous les autres discours ont tendu à fortifier chez les assimilateurs l’opinion qu’en nous saturant d’anglais ils nous rendent un réel service. Voilà la « fausse oosition » si bien décrite par notre Sauvage. Tout ce chapitre est à lire, à relire, à marteler dans nos têtes et à faire pénétrer patiemment dans le dur cerveau de tous les Anglo-Saxons que chacun de nous peut avoir la chance d’atteindre.


* * *


Je voudrais m’arrêter sur ce point d’accord. Il y a pourtant un autre chapitre qui appelle également une divergence d’opinion. C’est celui, si intéressant, où l’auteur raconte brièvement la triste histoire de l’annexion des Territoires du Nord-Ouest. Evidemment, ce Sauvage a lu bien des choses. Il a eu accès à maints documents oubliés, à d’autres peut-être inédits. Du point de vue des Métis et, généralement, des habitants de l’Ouest, au moment de l’annexion, ses conclusions semblent irréfutables. Tout ce qu’il dit de l’arrogance et des empiètements des Ontariens est