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L’IMBROGLIO SCOLAIRE

tente » en matière scolaire, dont les magistrats ontariens se plaisent à gratifier la législature de leur province ? Pour le prétendre, il faut, non seulement faire abstraction de toutes les lois divines et humaines, mais encore chasser de son esprit les derniers vestiges du plus vulgaire bon sens.

Aussi nos fameux éducateurs législatifs commencent-ils par se mettre en révolte ouverte contre le principe fondamental et élémentaire de toute éducation, qui consiste à faire l’enfant s’élever peu à peu du connu à l’inconnu. — Nos législateurs, eux, veulent absolument que tous les enfants canadiens qui n’ont pas eu le bonheur de naître anglophones, partent de l’inconnu pour… oublier ce qu’ils connaissaient auparavant.

Mais, il ne faut pas trop leur en vouloir. Que voulez-vous ? Ils sont subjectivistes à outrance. Je ne sais s’ils font du subjectivisme, comme monsieur Jourdain faisait de la prose, sans le savoir ; mais, une chose certaine, c’est que sous ce rapport, ils pourraient rendre des points au vieux Kant lui-même. Ils sont absolument incapables de comprendre qu’on puisse avoir une mentalité et une manière de voir différentes des leurs. Or, comme ils sont unilingues ils ne comprennent naturellement rien ni à l’histoire, ni à la géographie, ni à l’arithmétique, ni à une science quelconque, si on la leur expose en une langue autre que l’anglais. D’où ils concluent, de la meilleure foi du monde, que tous ceux qui ignorent l’anglais ne peuvent connaître aucune science et sont des êtres bien malheureux et inutiles pour la société.

Scrutez les articles publiés sur la question scolaire par la presse anglaise du pays, et vous verrez que presque tous partent de ce fond niais de naïveté subjectiviste. C’est même ce qui fait le plus bel ornement des considérant d’un des jugements rendus par la Cour supérieure de l’Ontario, dans la cause des écoles d’Ottawa. Ces gens-là s’imaginent tout simplement que l’anglais est le langage naturel de tous les hommes, et même des animaux.

Un jour, un Anglais me demanda si je ne pensais pas qu’un Canadien de notre voisinage était fou. — Je ne m’en suis jamais aperçu, répondis-je. — Imaginez-vous, continua-t-il, que ce fellow, parle en français à ses chevaux, « and I ask